Trek à Madagascar
M
assifs des Tsingy et du Makay.

Date de publication : Nov 03, 2019

Album de Jean-Pierre Te.


Album de Jean Bo.


Album de Jean-Claude De.

30 septembre au 18 octobre 2019


Notre arrivée à Antananarivo «Tana» nous permet de visiter la ville, ses monuments marquants et en particulier le palais de la Reine sur la ville haute, vue magnifique sur l’agglomération de quelques 3,5 millions d’âmes.

Il nous faut une bonne condition physique et un goût certain pour l’aventure sur cette petite vingtaine de jours pour aller fréquenter l’ouest de la Grande Ile. C’est un trek soutenu de niveau 4.

Nous sommes 8 cafistes emmenés par notre guide malgache «Momo» du tour operator «Terres Oubliées».

Le lendemain, nous grimpons dans les 4x4 à destination d’Antsirabe où nous logerons à 1500m d’altitude. Arrêts en cours de route à Ambatolampy dans les collines de l’Ankaratra pour admirer le travail des artisans spécialement dans une fabrique d’ustensiles en aluminium et la transformation pittoresque des cornes de zébu en multitudes d’objets divers. La poursuite dans les hautes terres agricoles, par des routes souvent défoncées nous fait traverser nombre de villages, de maisons en bois et en paille où se mélangent dans des panaches de poussière, animaux, enfants, petits marchands et deux roues de fortune.

A Antsirabe, nous effectuons une balade traditionnelle en pousse-pousse; c’est la « Vichy malgache » avec son urbanisme colonial ponctué d’un centre thermal célèbre. Ambiance agréable mais la chaleur monte. Notre route se poursuit plein ouest; le paysage de rizières fait place aux roches sédimentaires jusqu’à Masiekampy, par le village de Belo, lieu de l’embarcadère pour une «croisière» de deux jours et demi sur la Tsiribihina, grande rivière côtière.

Ici, nous devions embarquer sur un chaland à fond plat mais le niveau bas de l’eau laisse trop de place aux bancs de sable et le bateau ne peut remonter à notre hauteur; ce sont donc trois pirogues que nous allons enfourcher sur un kilomètre pour gagner le navire en attente en aval. Notre voyage aquatique vers l’ouest sur 150 kms est un élégant farniente où l’on a tout loisir de découvrir la flore très riche des rives avec les aloès, les kalanchoés, les pachypodiums et les baobabs. Un oeil aussi dans les roseaux et les rochers des rives pour voir quelques beaux spécimens de crocos se dorer au soleil ; certains dépassent trois mètres… pas envie de se baigner, l’eau est pourtant tiède! le cours est large de 100 à 350 mètres avec des bancs de sable, l’ambiance est ligérienne sauf quelques beaux oiseaux pécheurs et échassiers peu ordinaires; nous admirons en vol les guêpiers, les martins-chasseurs, les couas (sortes d’oies) les coucals au chant mélodieux.

Nous campons le soir venu sur des plages de sable fin, proches de grands feux que nos guides allument régulièrement; pour favoriser notre sommeil et dissiper peut-être nos craintes, ils nous gâtent d’apéros copieux au rhum arrangé…ça passe !

Quelques excursions à terre vont nous permettre (avec relais de pirogues) d’entrer dans des affluents pour visiter frontales allumées, des grottes à concrétion entièrement submergées à la saison des pluies; curieusement, il y fait plus chaud qu’à l’extérieur ! nous pénétrons aussi un canyon dont le fond nous réserve une splendide cascade (30m de haut environ) et des vasques

d’eau claire dans les rochers où nous nous baignons avec un plaisir délectable. Déjà quelques lémuriens apparaissent, peu sauvages attirés par les fruits que leur donnent nos guides.

Au troisième jour de notre descente du fleuve (à l’entrée du delta sur l’océan côté Mozambique) nous accostons à Tsaraotana et retrouvons des 4x4 pour atteindre par des pistes athlétiques les portes du Parc National des Tsingy de Bemaraha.

Nous traversons la Tsiribihina par bac fluvial car il n’y a plus aucun pont et faisons une pause à Belo au restaurant très couleur locale « Mad zébu » ; nous sommes le soir à Bekopaka, après voir traversé la rivière Manambolo du même type que la rivière précédente.

Le lendemain, nous découvrons un site des plus étonnant qu’on connaisse avec les Petits Tsingy ; c’est un vaste massif de calcaire noir, aux aiguilles très acérées qui formait il y a cinq millions d’années la barrière corallienne côtière. Décor spectaculaire, site et belvédères aménagés dans un grand respect de l’environnement; parcours mouvementé de canyons, diaclases, rampes de cordes, vires et ponts suspendus avec des vues sur une forêt de pierres grises chargées de fossiles, d’une beauté à couper le souffle; les sommets sont de véritables planches de fakirs! mémorable parcours sanglier.

Le lendemain, c’est à 17km au nord où nous nous rendons, toujours par des pistes scabreuses (l’accès est chaotique) aux grands Tsingy du Bemaraha (150000 hectares); rappel du relief karstique de la veille aux dimensions quadruplées. La maison du Parc National nous fournit du matos de via ferrata; il faut parcourir sur 4 km en 4 heures le circuit équipé de l’Andamozavaky atteint par une traversée de forêt sèche; les vires, couloirs, dièdres, ponts suspendus, failles profondes se succèdent; ici, 60% de la faune et de la flore sont endémiques, chaque pas est une découverte !

Nous reprenons la piste vers Morondava, capitale sur l’océan de l’ethnie Sakalava (nomades traditionnels de la mer à la peau très noire); arrêt en passant à 18km avant notre ville à la célèbre «allée des baobabs»; un spot de choix au soleil couchant pour un spectacle de contrastes inoubliable; 30 arbres énormes pluricentenaires qui dressent leur silhouette magistrale à la frondaison atrophiée de part et d’autre d’une piste sableuse au dessus des rizières; nous avions fait peu avant une pause pour admirer «le baobab sacré», arbre millénaire, champion du gigantisme végétal avec ses quelques 35m. de haut, 5 mètres de diamètre (presque 16 mètres de circonférence !) où les malgaches viennent déposer des offrandes en faisant des voeux de santé. On verra aussi un baobab entrelacé, surnommé «le baobab amoureux» où nous avons la chance de pouvoir surprendre et flasher de très près quelques lémuriens Catta dans la réserve forestière de Kirindy.

De Morondava, nous nous acheminons dans des paysages semi-désertiques et par des pistes acrobatiques vers le massif du Makay qui va occuper la dernière semaine de notre séjour.

Nous pénétrons au petit matin dans le massif, avec nos deux guides (Bizac est venu s’ajouter à Momo) et nos 21 porteurs car nous sommes en totale autonomie pour ces 6 journées.

Ce massif gréseux qui culmine à 1034 m. 180 km de long et 35 à 40 km de large, est formé de plateaux arides et d’un incroyable et dense entrelacs de canyons; ici, seuls au monde ou presque, (croisé deux autres groupes d’aventuriers sur le retour) - 200 visiteurs en 2018 sur tout le massif.

C’est un patrimoine naturel unique au monde et notre voyage devient extraordinaire! Forteresse minérale et coffre-fort de biodiversité, tout le massif est vierge de toute trace et équipement humain. Les premières explorations remontent à 2010 et 2011; nous avons la chance d’avoir nos deux guides qui sont eux-mêmes découvreurs et passionnés du massif et vont nous guider dans de somptueux canyons, dont l’un, remarquable de beauté et de pureté a été par eux découvert en Mai 2017.

Ici, 300 espèces de plantes différentes dont 80 % endémiques du massif; nous allons rencontrer dans ces labyrinthes de failles inextricables et luxuriantes au prix de la remontée des rivières, avec de l’eau parfois jusqu’à la taille, quantité d’animaux vus nulle part ailleurs; quelques serpents, scorpions, caméléons, iguanes oplurus, mantellas (petites grenouilles noires au ventre bleu et ocre), des sifakas, lémuriens propithèques à la fourrure blanche épaisse, des rongeurs(mangoustes ,rats sauteurs,) des hiboux petitduc entendus la nuit tombée dans les hautes falaises et de multiples oiseaux dont le perroquet noir, le milan, le corbeau-pie, le cucal au chant mélodieux, le drongo à huppe, quelques rapaces fugaces, quantité de fourmis: 169 espèces à Madagascar dont 40 endémiques ici, parmi les roseaux piquants(les «bararatas») les palmiers bambous et les manguiers sauvages.

Il y a encore des araignées géantes des chauves-souris frugivores géantes que nous ne verrons pas hélas! car très sauvages, le «foussa» sorte de gros chat sauvage apparenté au puma, grand prédateur des lémuriens. On observe aussi dans l’eau claire et tiède et en stationnaire des pachypandax, petits poissons colorés de 4 à 8cm de long.

Nos porteurs font un boulot remarquable; leur adresse et leur savoir-faire nous laissent pantois; nos cuisiniers sont eux aussi excellents; ils ont emporté les viandes vivantes que nous allons consommer chaque jour; poulets, coqs, canards et même un mouton! car c’est la meilleure manière de les conserver avec la chaleur humide omniprésente et même des crabes conservés dans de la boue.

C’est un paradis terrestre, le dernier peut-être…unique au monde; les remontées quotidiennes des canyons Anapanda et Sakapaly sont sportives; franchissement d’embâcles (arbres mastocs, rochers coincés) et nécessitent le passage dans des étroitures sinueuses réservées aux tailles de guêpe; il faut parfois ramper dans l’eau heureusement cristalline et escalader des dièdres glissants moussus! cuisses et abdominaux sont bien sollicités avec des débits d’eau de 3 à 4 m3 par seconde parfois; la souplesse et l’agilité sont de rigueur; les fonds sont souvent sableux, parfois comblés de galets et de quartz, quand ils ne sont pas incrustés dans le grès rouge. Par intervalle, nous faisons la liaison avec les plateaux tabulaires de savane grillée, écrasés de chaleur, où l’horizon s’étend à perte de vue. Admiré aussi un propithèque blanc au sommet d’un ravin, faire des bonds de 5 mètres en fuyant sur une vire, effrayé peut-être d’avoir été surpris par notre présence.

On a remarqué aussi que nos guides sont armés; fusil en bandoulière et cartouchière de ceinture, pour prévenir de toute éventuelle attaque des «dahalos», voleurs de zébus constitués en bande armée et organisée qui cachent leur troupeaux dérobés et n’hésitent pas à détrousser voire tuer ceux qui sont en travers de leur route..

Les derniers canyons nous révèlent des bois silicifiés dans des sables argileux; nous sommes parfois dominés par des falaises rapprochées de 200 m de hauteur où les étroitures sont interdites aux trekeurs bedonnants; des imbroglios d’itinéraires sont le secret de nos guides et la claustrophobie est déconseillée; nous parcourrons ainsi 95 km dans le Makay; on aura ingurgité 3 à 4 litres d’eau par jour! nous campons le soir sur de petites plages, là où le canyon s’est interrompu; une nuit aussi à la belle étoile (on cherche la croix du sud…)toujours à

côté de bons feux de camp.

L’ambiance durant cette semaine reste étrange et un peu mystérieuse. Et nous laisserons les lieux et leur symphonie de couleurs à leur quiétude pour revenir au camp de départ et reprendre les 4x4 en traversant forêts de manguiers rizières et les multiple bras de la rivière Manapanda.

La nuit suivante est inconfortable au village de Miandrivazo, logée dans une cuvette plombée de chaleur; retour ensuite à Tana dans une symphonie de couleurs avec les jacarandas en fleur mauves; douche lénifiante et nuit réparatrice à notre très confortable. Hotel «Rova». Le lendemain, dernier jour malgache, visite du site collinaire d’Ambohimanga («la colline bleue»), à 22 km de Tana qui a servi longtemps de capitale à la famille royale merina, lieu hautement symbolique classé au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 200; très beau témoignage historique du pays avec quelques édifices royaux typiques dont les tombeaux des dignitaires malgaches.

Retour à Tana puis, un peu fatigués, nous faisons nos adieux à l’aéroport à notre excellent guide Momo, les mirettes encore toutes pleines de ces merveilles naturelles, d’une intensité exceptionnelle et jamais rencontrée.

Jean-Luc et Evelyne Chéron, 24 octobre 2019

Participants : Jean, Jeannette, Jean-Claude, Annie, Sylvie, Jean-Pierre, Jean-Luc, Evelyne.

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